Article oiseau du mois

Qui est l’oiseau du mois ?

Puffin des Anglais  (Puffinus puffinus )

© E. Rousseau

ETYMOLOGIE

Puffin viendrait de l’anglais to puff, souffler, en référence à la capacité qu’a cette espèce à projeter par le bec une substance huileuse et nauséabonde. Puffinus est la latinisation de puffin. L’expression « des Anglais » vient du fait qu’il s’agit du puffin le plus répandu dans l’Atlantique Nord et qu’un des sites de nidification les plus anciennement connus est sur l’île Calf of Man, entre l’Irlande et la Grande-Bretagne.

DESCRIPTION       

Oiseau de mer de la famille des Procellariidae, le Puffin des Anglais (Puffinus puffinus) long de 30 à 38 cm pour une envergure de 76 à 82 cm (soit à peu près la taille d’une Mouette rieuse) pèse de 350 à 450 g.

Il est nettement contrasté entre le dessus noirâtre et la blancheur du dessous, du bec aux sous-caudales. On note une “encoche” claire (“demi-collier”) derrière les parotiques (joues). La calotte sombre descend jusqu’en dessous des yeux. Le dessous des ailes, blanc argenté comme l’ensemble du dessous de cet oiseau, est bordé de noir, largement aux extrémités et plus finement sur le pourtour. A noter la tache blanche à l’arrière de l’aile remontant légèrement sur le dos. Le bec noir mat et fin est surmonté des narines tubulaires pourvues d’une glande spéciale permettant d’excréter les excédents de sel comme chez les albatros et pétrels. A la fin du printemps et en été le dessus devient brunâtre quand les plumes des oiseaux sont usées.

REPARTITION & HABITAT

Ce puffin est essentiellement marin, couvrant tout l’Atlantique depuis la Terre de feu (Cap Horn) et la pointe de l’Afrique du Sud jusqu’au nord-est du Canada, le Groënland, l’Islande et le Royaume-Uni. Il ne vient à terre que pour se reproduire.

En Europe il niche surtout de l’Islande à la France, 90% des effectifs étant concentrés dans les Iles Britanniques. Des populations isolées sont situées à l’extrême Nord-Ouest de l’Amérique du Nord, aux Açores, à Madère et aux Canaries.

La population nicheuse française se limite à la Bretagne qui accueille entre 360 et 767 TAO (terriers apparemment occupés) recensés en 2021 sur les principales colonies des Sept-Iles (22), de l’archipel de Molène (29) et de l’archipel de Houat (56) avec une tendance à l’augmentation qui se poursuit. Ce faible effectif, comparé aux dénombrements des Iles Britanniques, est lié à la limite orientale de la zone de nidification de l’espèce.

VOL

Par temps calme, le vol est composé de séries de battements d’ailes rapides peu amples avec les ailes raides, alternant avec de longs glissés bas, les ailes un peu abaissées, tandis que l’oiseau se balance d’un côté à l’autre. Par temps agité, le vol est presque entièrement plané, composé de montées et de descentes au-dessus des vagues en arcs peu profonds. Ces excellents voiliers peuvent, pour nourrir leurs petits, aller en 24 heures du sud de la Grande-Bretagne au sud du Golfe de Gascogne (1 000 kilomètres).

ALIMENTATION

Le puffin des Anglais se nourrit essentiellement de petits poissons (sprats, anchois, harengs…), de crustacés, de céphalopodes (seiches, calmars…), et de divers débris alimentaires ramassés en surface en plein vol, profitant de l’aide de mammifères marins ou de bancs de poissons prédateurs qui rabattent les proies vers la surface.

MIGRATION  

La très grande majorité des oiseaux opère une migration transéquatoriale pour rejoindre leur zone d’hivernage au large du Brésil, de l’Uruguay et de l’Argentine. Les oiseaux européens pratiquent typiquement une migration en boucle horaire, influencée par les vents dominants. Après la reproduction, celle-ci les fait passer au large de la péninsule ibérique et de l’Afrique de l’Ouest pour rejoindre l’Amérique du Sud.

Ainsi, à Brignogan (29), alors que les effectifs annuels moyens se situent entre 500 et 2500 oiseaux, les 10 premiers jours de septembre 2019 ont été marqués par le passage de 19380 oiseaux (avec un record de 7155 individus le 1erseptembre) provenant de la Manche et de Cornouailles.

Depuis l’Amérique du sud, le trajet de retour vers les colonies les voit remonter assez haut vers le Nord-Ouest de l’Atlantique puis bifurquer vers l’Est pour rallier l’Europe

 

 

 

 

 

 

VOCALISATIONS

Généralement muet en mer, cet oiseau devient bruyant sur les lieux de nidification, surtout le soir lors du retour des conjoints partis en pêche, poussant des grognements et des croassements ressemblant à des sanglots étranglés.

Écouter ces chants et cris 

REPRODUCTION – NIDIFICATION

Il commence à se reproduire vers 5-7 ans et est monogame. La saison de reproduction commence en mars lors du retour sur ses colonies situées sur les pentes herbeuses abruptes des îles côtières ou au large ou sur des promontoires. Ces oiseaux nidifient dans des terriers creusés par eux-mêmes ou abandonnés par des lapins. Son activité nocturne sur les colonies rend difficile les décomptes.
Après l’accouplement, la femelle seule quitte la colonie afin d’aller se nourrir pendant deux ou trois semaines avant la ponte qui a lieu en général fin avril. Elle dépose un gros œuf blanc. Les deux adultes partagent l’incubation (47-66 jours), d’abord le mâle et ensuite le couple qui prend des tours durant de 3 à 5 jours. Tandis que l’un incube, l’autre part pêcher en mer parcourant parfois plusieurs centaines de kilomètres dans la journée.  A la naissance, le poussin, couvert de duvet gris-brun, est nourri d’une bouillie de poissons par les deux parents pendant 2 mois et uniquement la nuit. Le juvénile est abandonné par ses parents, tirant profit des réserves de graisse avant d’avoir toutes ses plumes, puis part alors seul en mer au bout de 8 à 9 jours plus tard, poussé par la faim. Il part vers l’Atlantique sud.

LONGEVITE

Cette espèce a une longévité habituelle de 25 à 30 ans et certains individus peuvent atteindre ou dépasser les 50 ans. Un puffin des Anglais capturé et bagué alors qu’il était adulte en juillet 1953, a été recapturé en juin 2003 ; il avait alors au moins 53 ans.

MENACES

Le Puffin des Anglais n’est pas globalement menacé pour le moment, bien que la prédation sur les colonies par les diverses espèces invasives (Vison d’Amérique sur l’île Tomé (22), rats, chats) représente la principale menace. L’espèce est sensible aux pollutions marines, aux techniques de pêche. L’absorption régulière de matières synthétiques (plastiques p.ex.) est prouvée par les analyses des contenus stomacaux.

STATUT & PRESERVATION

Malgré une tendance générale inconnue, le Puffin des Anglais est classé en « préoccupation mineure » (LC) par l’IUCN à l’échelle mondiale et européenne avec 342 000 à 393 000 couples en Europe.

Il est classé dans la catégorie “Localisé” par Bird Life International, car 90 % de sa population niche sur seulement 10 sites recensés, en Grande Bretagne et en Irlande.

Il en est de même pour l’AEE (Agence Européenne pour l’Environnement) depuis 1994 ; cette espèce a été de plus déclarée comme « en danger » par l’Espagne en 1992 pour les populations des îles Canaries.

La population française (360-767 TAO en 2021 cf ci-dessus), considérée par la liste rouge nationale comme « En danger » est en revanche classée « Vulnérable » par la liste rouge régionale de 2021 avec un niveau 5 pour la Responsabilité Biologique Régionale (RBR)

Elle figure aussi en annexe II de la Convention de Berne (protection de la vie sauvage).

Le saviez-vous ? Plusieurs États ont émis des timbres à l’effigie de cet oiseau : l’île d’Aurigny en 2003, l’île de Man en 1973 et 2006, et la Tanzanie en 1999.

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