Article oiseau du mois

Qui est l’oiseau du mois ?

La Mouette de Sabine (Xema sabrini)

© P. Dubois

C’est lors des sorties en mer organisées par Bretagne Vivante en août et septembre que l’on peut observer ce petit laridé (27 à 33 cm pour une envergure de 81 à 87 cm et un poids de 135 à 225 g), alors en migration.

Rencontre

À cette époque, les individus sont encore en plumage nuptial avec ce capuchon gris anthracite, bordé d’un fin collier de jais, ce bec noir à la base et jaune d’or à la pointe, ce dos gris bleuté soutenu s’étendant sur les couvertures alaires, ces rémiges blanches butant contre le grand triangle noir du bout de l’aile et cette queue échancrée. Quelle élégance… doublée d’une finesse de la voilure avec une silhouette aiguë de Sterne et voletant au-dessus de la vague, picorant la surface sans y faire halte !

Sous-espèces et distribution géographique 

Elle connaît une distribution circumpolaire assez fragmentée. Des quatre sous-espèces reconnues au monde, deux sont susceptibles de fréquenter nos eaux européennes : X.s palaearctica qui niche au Spitzberg (2 à 5 couples !) et dont l’essentiel de la population se reproduit dans l’Arctique russe à l’est du Taïmyr et jusqu’au delta de la Léna et surtout X.s sabini se reproduisant au Groenland (100 à 500 couples) et dans l’Arctique canadien.

Reproduction de l’espèce

En fonction de la latitude et de la couverture neigeuse, la ponte commence à partir du mois de juin, en petites colonies de 15 à 20 couples à proximité des Sternes arctiques, ou en couples isolés. Le site du nid se situe généralement dans la toundra marécageuse, les marais côtiers et les côtes basses, souvent près des étendues d’eau douce. Le nid contenant 1 à 3 œufs, est placé sur les rochers, le sol nu ou couvert d’herbe et de mousse, et près de l’eau. Il est fait avec des herbes dans une dépression ou un creux dans le sol.  Les deux adultes incubent pendant 23-25 jours. Trois jours après l’éclosion, les poussins quittent le nid et suivent les parents qui les élèvent et les protègent du Renard arctique, principal prédateur. Au bout de dix jours après avoir quitté le nid, les jeunes sont laissés seuls car les parents commencent leur migration vers le sud.

Migration

La Mouette de Sabine – du nom d’Edward Sabine (astronome et ornithologue irlandais) qui l’a découverte en 1818 sur un îlot à 30 kms de la côte lors d’une expédition à la recherche du passage Nord-Ouest dans la baie de Melville au Groenland – est probablement l’espèce de laridé détenant le record de distance de migration : jusqu’à 39 000 kms en un an !

Nidification terminée, elle devient un migrateur marin transéquatorial, migrant en groupes composés de quelques oiseaux ou de centaines d’individus, habituellement à quelques milles au large, au-dessus de la plaque continentale.

Plusieurs voies de migration existent. En Amérique du Nord, les oiseaux nichant en Alaska hivernent dans l’Est de l’Océan Pacifique au large du Pérou dans le courant de Humbolt et les plus orientaux (jusqu’au Groenland) rejoignent la zone d’upwelling de Benguela au large de la Namibie et de l’Afrique du Sud, soit dans le sud-est de l’Océan Atlantique. Les oiseaux canadiens et groenlandais font une longue halte dans le Golfe de Gascogne (45 jours environ) conférant à ce site un rôle fondamental dans la biologie de l’espèce.

Au printemps, profitant des vents favorables, elles remontent rapidement (~ 800 km/j contre ~ 350 km/j à l’automne) vers l’upwelling des Canaries en face du Maroc (~19 jours de halte) sans passer par l’Europe pour rejoindre les colonies.

Menaces

La Mouette de Sabine est classée « en préoccupation mineure » par l’UICN en raison de sa population élevée. Qu’il s’agisse du Golfe de Gascogne ou des upwellings du Bengala et des Canaries, elles dépendent de zones d’alimentation riches en petits poissons et zooplancton qui font l’objet de fortes pressions de pêche.

Si elles vont volontiers profiter des rejets de poissons morts autour des bateaux, l’épuisement des ressources constitue une menace importante comme pour tous les oiseaux marins. À cela s’ajoutent les dérangements causés par les humains dans le nord-est du Groenland, et de la chasse et de la récolte des œufs en Alaska.

©P. Dubois

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